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Le voirloup est une créature fantastique maléfique et nocturne mentionnée dans le folklore français propre au Pays d’Othe. Contrairement à une croyance très répandue, il ne s’agit pas d’une sorte de loup-garou mais plutôt d’un « cousin » de celui-ci, puisqu’il peut se transformer en d’autres animaux que le loup.

Le voirloup est propre au Pays d’Othe, ce massif s’étend entre Sens, Troyes et Joigny en unissant les départements de l’Aube et de l’Yonne, il forme une bande d’environ vingt kilomètres de large sur cinquante kilomètres de long. La région comprise, à l’est, entre Maraye-en-Othe et Bercenay-en-Othe est la plus fertile en légendes sur les voirloups.

Les voirloups sont à l’origine des hommes ou des femmes aux âmes noires, coupables des sept péchés capitaux et qui se laissent posséder par Satan ou le Bélial. Pendant leur période de transformation, ces créatures peuvent prendre la forme de loups, mais aussi de renards, de sangliers, de boucs, ou de chats, en fait, de toutes les bêtes malfaisantes dans la peau desquelles il leur est facile de nuire impunément.

Les voirloups se métamorphosent à minuit, après s’être enduits les membres inférieurs, devant et derrière, avec une mixture nommée l’amalgame (composée de semence humaine obtenue dans les sabbats, du sang nuptial d’une vierge, de la graisse d’un porc tué le vendredi saint, à trois heures de l’après-midi, qui est devenue rance, et d’un filet de bave du Diable ils adressent une supplique à Satan et sont recouverts par le pelage de l’animal désiré tout en conservant l’entendement humain. Ils se promènent dans la forêt de minuit à l’aube sans faire de bruit, égorgent et dépècent les chiens et le bétail et se désaltèrent du sang de leurs victimes. Les voirloups sont généralement solitaires mais ils savent se retrouver pour associer leurs pouvoirs maléfiques. La vue du sang les affole et ils ne se calment qu’en versant le sang à leur tour. Les voirloups sont souvent invulnérables, ce sont des adversaires très dangereux pour l’être humain auquel ils s’attaquent, toutefois, ils ne les tuent pas mais leur sucent parfois le sang comme des vampires. Il est impossible de tuer les voirloups, en revanche, lorsqu’on les blesse, même s’ils sont insensibles à la douleur et guérissent très vite, ils en conservent toujours des cicatrices. Les yeux du voirloup peuvent allumer la paille ou le fourrage à distance, à flanc de coteau, dans les champs, les granges ou les sinots. Plusieurs témoignages rapportent des feux nocturnes aux environs de Maraye-en-Othe et de Bercenay-en-Othe ; chaque fois, une silhouette furtive et inquiétante, mi-bête mi-homme, se dessinait sur la crête. Les voirloups sont de plus nyctalopes et redoutent les premières lueurs du jour car lorsque le Soleil se lève et que le coq se met à chanter, leur peau animale éclate et ils reprennent forme humaine.

Les voirloups passent leurs journées à épier les mortels pour vérifier qu’on ne dit ni n’écrit rien sur eux. Ceux qui se risquent à les décrire sous leur forme animale en font connaissance à la nuit tombée. On les piège difficilement, ils n’ont pas la faculté de jeter des sorts mais les voirloups sont par nature poussé à accomplir le plus de mal possible au nom de Satan. Sous leur forme humaine, ils sont facilement reconnaissables à la tache rougeâtre qu’ils présentent au bas de la colonne vertébrale, ou encore à la fourche à deux dents qui se dessine sur leur épaule gauche.

Le père Vivien, curé de Maraye-en-Othe, fut attaqué par les voirloups alors qu’il traversait le bois de Vire-Loup la nuit, accompagné d’un enfant de chœur qui portait la lanterne et la croix processionnelle. Ils se rendaient à La Perrière afin de porter les derniers sacrements au vieux Balthazar Cornarot qui agonisait. Certaines commères de la paroisse avaient vu la marque d’une tête cornue avec une barbiche en pointe sur le bras gauche de Cornarot mais le curé Vivien ne voulait rien savoir, les voirloups s’acharnèrent donc sur lui pour l’empêcher de porter les derniers sacrements au vieux qui avait pactisé avec le Diable. Grâce à son courage et des aspersion d’eau bénite, le prêtre arriva au chevet du mourant pour lui administrer le viatique et lui appliquer les huiles saintes. Un vent furieux et vindicatif salua sa prière ; les voirloups accusaient leur défaite d’un dernier geste rageur.